Le « Lion » et le « Loup » : La fable Black & Blue Note

Ou comment le jazz a grandement contribué à combattre l’inégalité de couleur de peau.

 

Et si Donald se mettait à la Trumpette ?…

Nombre de courants artistiques ont germé lors de la cohabitation forcée entre deux peuples opprimés. La naissance de la musique noire, intelligence rythmo-musicale par excellence, en est un exemple iconique.

Le fameux « street wise » de Chicago.
Cette intelligence de rue, née de la mixité non choisie entre les Juifs qui avaient fui les pogroms et les Noirs, les champs de coton du sud, aboutit aux premiers enregistrements musicaux américains produits par les premiers qui écoutaient la musique des seconds.

C’est ce que l’on appelait les « race records » : des disques qui véhiculaient la Blue Note – la légendaire 5ème diminuée d’un demi-ton pour les mélomanes.

Celle qui exprimait le bleu des âmes martyrisées par l’esclavagisme.

Un brouillard de croches en suspension glaçant parfois le cœur une fin d’après-midi pluvieuse.

La note qui traduisait la mélancolie, la perte de racines, la souffrance et la joie de vivre.

Un timbre sourd qui permettait de rythmer le dur labeur des champs de coton dans des conditions exécrables et de communier dans des églises de fortune par des gospels.

 

À cette époque le racisme était présent partout aux États-Unis.

Il l’est encore, malheureusement, comme les récents événements viennent de nous le prouver.

Mais il faut bien se rendre compte de ce que c’était à l’époque, voire un peu plus tard dans les années 30. L’exutoire, le Rythm & Blues puis le Jazz, probablement la plus puissante des musiques américaines, s’exprimait alors confidentiellement à chaque coin de rue jusqu’à la 132ème d’Harlem. Mais jamais personne, et encore moins un musicien noir, n’aurait imaginé être enregistré.

Mieux… de devenir célèbre !

 

C’est là qu’intervinrent Alfred « Lions » et Francis « Wolff », deux juifs allemands amoureux du jazz qui s’étaient rencontrés à l’Admiralspalast de Berlin lors d’un concert de Sam Wooding, peu avant l’arrivée d’Hitler au pouvoir, et qui devinrent frères de sang et de cire noire : celle qui allait graver à jamais les chefs d’œuvre du label jazz Blue Note qu’ils créèrent en 1939 à New-York après avoir fui l’Allemagne nazie, avec une seule idée en tête, quasi mystique : utiliser et produire la musique existentielle des noirs afin de lutter contre une ségrégation à laquelle ils venaient eux-mêmes d’échapper.

Jamais une démarche altruiste n’a eu autant d’effet dans l’affranchissement du peuple Afro-Américain, dans la possibilité enfin offerte aux noirs d’utiliser leur musique pour véhiculer leur art, sortir du joug de l’exclusion, et trouver des lettres de noblesse.

Force est de constater que l’équilibre reste fragile, comme une vitrine chargée de porcelaines.

Or un éléphant ça Trump énormément…