Sexualité & Covid. Acte 1

Un préambule indispensable dès lors que l’on parle d’études sur la sexualité : presque tous les résultats sont… biaisés. Ainsi, si l’on prend un couple et que l’on demande séparément à chaque membre la fréquence des rapports sur une période donnée, les résultats diffèrent.

Il m’a semblé intéressant de soumettre les données nationales et internationales à Brigitte Lahaie – l’une des plus grandes expertes en matière de sexualité et ses comportements – qui a recueilli moults témoignages d’auditeur(trices) au cours de ses émissions sur l’antenne de Sud Radio.

Cette étude comporte trois chapitres :

Dans celui-ci nous évoquerons la libido.

Dans le prochain post nous aborderons le passage à l’acte sexuel.

Dans le troisième nous tenterons de comprendre si un retour à la normale est envisageable ou si de nouvelles habitudes sont définitivement ancrées…

 

Qu’en est-il de l’évolution de notre libido depuis le 1er confinement ?

Petit propos liminaire : il faut absolument distinguer la libido, profonde, instinctive, et sa concrétisation par un axe sexuel – pandémie ou pas. Beaucoup de femmes désirent, par exemple, leur compagnon l’après-midi (et réciproquement) et l’envie disparaît lorsqu’ils se retrouvent. Soit parce qu’elle a été étouffée par le train-train quotidien, soit à cause d’une remarque déplacée, d’un coup de fatigue…

Un couple sur 4 questionné par l’IFOP avoue ne plus avoir de rapport depuis la Covid (contre 1/10 en temps normal). Fortement réduite, notre libido a surtout été impactée par les 2e et 3e confinements – le 1er confinement ayant plus été vécu comme une découverte, une curiosité, une capacité de ralentir le temps. En revanche, la lassitude, l’anxiété et le stress se sont développés et consolidés par l’absence de visibilité de l’évolution de la pandémie. Or ils sont les ennemis n°1 de la libido.

D’autres causes peuvent expliquer ce recul de libido :

  • accès limité aux moyens de contraception,
  • obligation de cohabiter sur le long terme,
  • inquiétude financière ou relative à l’emploi,
  • cadre de vie restreint et proximité des enfants,
  • repli sur soi, dépression, …
  • laisser aller physique, vestimentaire… Brigitte Lahaie souligne, en l’espèce, le nombre considérable de vente de pantoufles – véritable « tue l’amour », pendant cette période. « On voit l’autre dans un autre contexte qui n’est pas forcément valorisant ». Les gens ont pris du poids, ne faisaient aucun effort vestimentaire. Les femmes ne pouvaient plus aller chez le coiffeur ou avoir accès aux soins de beauté…
  • peur de transmettre le virus mais qui n’a impacté que 3,2% des couples seulement (étude polonaise).

Pour ceux qui ont mal vécu le confinement, on constate une baisse de 35% de la libido chez les couples et de 29% chez les célibataires.

Des études italiennes et américaines démontreraient que cette libido a plus reculé chez les hommes – mais rien n’est moins sûr selon Brigitte Lahaie : « Je ne vois qu’une explication plausible, c’est l’impossibilité de l’infidélité des hommes », même si 36% des hommes auraient bravé les interdictions pour retrouver leurs maîtresses…

Une autre explication me semble intéressante pour expliquer l’absence de libido : c’est le fait d’avoir en quelque sorte « sublimé » cette libido par l’ouverture à certaines de nos 10 intelligences, en vue d’autres formes de plaisirs : l’intelligence naturaliste (retour aux valeurs), l’intelligence verbo-linguistique (jamais les maisons d’éditions n’ont aussi bien fonctionné), l’intelligence spatiale (art culinaire), l’intelligence kinesthésique (une grande énergie mise dans les créneaux pour se promener), etc.

La question de la libido est devenue un réel calvaire pour les homosexuels et plus globalement pour les jeunes, lesquels, confinés chez les parents, sans maîtrise de leur futur, ne pouvaient trouver d’exutoires avouables.

En conclusion, toujours en prenant ces études avec des pincettes (ou plutôt des gants de velours), force est de constater que notre libido a été très impactée par le recul du territoire de l’intime. La proximité forcée chez les couples a eu pour conséquence de vouloir encore plus contrôler l’autre. « Les esprits ne se sont pas ouverts, précise Brigitte Lahaie. Plus l’autre est proche, plus on va avoir tendance à le posséder. Une dépendance se crée et une surveillance mutuelle se fait jour. N’oublions jamais que le désir se nourrit du manque ».

Nous ne sommes pas sortis de l’auberge, car le nombre de « dépressions Covid » ne cesse d’augmenter.

Prochain volet : le passage à l’acte sexuel…