06 Avr Une plongée intime…
Une plongée intime, ou comment un plongeur spécialisé dans la recherche de trésors enfouis dans des épaves a inspiré mon dernier roman « Vazco ».
Je ne sais plus comment à dire vrai, je me retrouve au premier étage d’un petit bureau sis avenue des Ternes, à Paris, pour y rencontrer Romain Duran, plongeur sous-marin spécialisé dans la recherche d’épaves pour y repêcher des trésors qui dorment depuis des années, voire des siècles. Et c’est beaucoup d’argent. Mille milliards selon des spécialistes.
Peu importe en fait – l’essentiel n’est-il pas le chemin ? Et celui-ci passe par l’écriture, l’intelligence verbo-linguistique,l’une de nos 10 intelligences que je ne pensais pas détenir. Jugez plutôt : 4 à l’écrit de Français au Bac, 6 en Philo… Un père aux critiques acerbes…
Une chose certaine cependant initie cette rencontre : changer de héros. Après quatre romans (« La note noire », prix du premier roman policier du Festival de Beaune en 2009, « A pas comptés », prix du Centaure Noir, « Lames de Fond », « Il n’est jamais trop tard »), signés Chris Costantini en hommage à ma maman défunte, et qui mettent en scène Thelonious Avogaddro, un flic américain bourru, fan de jazz, amoureux de femmes au charme vénéneux et exceptionnel limier, il me fallait passer à autre chose.
Romain Duran, le jeune homme et la mer, n’est pas comme je l’ai imaginé : un blazer sur un chino, élégant, une voix douce, une peau sans stigmate, bien loin du faciès buriné par le soleil et le sel de la mer que l’on rencontre sur les quais.
Mais il m’embarque.
Et il va m’expliquer comment on retrouve des épaves : passer des heures au Fort de Vincennes, par exemple, pour dénicher des livres de bord d’époque qui retracent le parcours des galions en vérifiant minutieusement qu’ils sont arrivés à bon port. Ou encore se concentrer sur les pays ou régions qui véhiculaient des richesses, qui retranscrivent s’il y a eu des renforts en hommes et en canons – signes de cargaisons précieuses. Tenir aussi une comptabilité des naufrages et des lieux approximatifs où ils ont été croisés la dernière fois avant leur disparition. Retourner un homard sur un marché pour voir son ventre : brun, c’est le signe de la présence d’une « croche », ces fameuses épaves métalliques connues seulement des bons pêcheurs qui ne s’aventurent pas au-delà de quelques mètres de profondeur. Prendre connaissance de chansons ancestrales d’habitants côtiers (l’Astrolabe, navire de La Pérouse, sera retrouvé grâce à une chanson de Vanikoro qui se passe entre générations) qui signalent les naufrages. Repérer les phares récents – signe qu’il y a eu de nombreuses avaries dans les parages. Vérifier dans les cimetières les noms des marins et les confronter aux fichiers écrits à la plume sur les quais d’embarquement. S’user les yeux aux rayonnages des bibliothèques espagnoles (Isabelle de Castille fut une grande mécène) pour retrouver le financement royal d’expéditions. Maintes choses encore… Puis, une fois l’épave découverte, la manière de négocier selon qu’elle se situe dans des eaux territoriales ou internationales.
Et je m’y suis mis, pendant deux ans. Cette « plongée », au fur et à mesure de l’écriture, n’est pas celle que je pressentais… Elle est intime, dans mes affres, dans une profondeur de l’âme, dans mon rapport aux femmes, nourrie par une mélancolie qui m’envahit à cette époque.
Il me semblait alors essentiel d’allier à ce roman d’aventure cette dimension de coaching de vie, de catharsis. Car on écrit avant tout pour soi. Jamais pour les autres.
Mon galion était prêt mais les corsaires modernes des maisons d’éditions tiraient dessus à boulets rouge avant même qu’il ne prenne la mer.
Puis j’ai lâché prise et les vents lui ont gonflé les voiles…
J’en fait de même avec certains coachés : les connecter à cette intelligence, les sentir ainsi prendre confiance et suivre avec eux les progrès très rapides.